jeudi 16 décembre 2010

Brèves de Trottoirs

En fouillant un peu sur le net on fait des découvertes réjouissantes. C'est le cas avec ce site de reportages, hommages aux figures des quartiers parisiens, Brèves de Trottoirs.



Portraits réjouis d'hommes et de femmes ballotés par la vie mais optimistes, positifs et confiants, ces reportages méritent d'être partagés. Les images sont belles, les personnes mises en valeurs, sans intrusion de la part du reporter : un beau cadeau fait par Olivier Lambert et Thomas Salva aux familles de ces personnages et aux internautes...

dimanche 5 décembre 2010

Le mystère du plateau ciselé

Il y a deux ans, j'ai trouvé dans un dépôt-vente ce très beau plateau de laiton, entièrement ciselé sur fond en bois et accompagné de ses pieds pour une somme dérisoire.

Je n'en connais pas vraiment l'origine, et encore moins le sens des écritures gravées sur le plateau et sur le côté. Je l'ai trouvé dans la Manche, où les articles apportés par les anglais installés dans la région sont nombreux, ce qui  nous laissait supposer qu'il était originaire d'Inde.

Les artisans de l'Atelier du Cuivre, eux, sont certains qu'il s'agit d'un plateau marocain.
J'ai demandé à plusieurs personnes qui lisent l'arabe, mais les ciselures qui enrobent les lettres sont trop présentes, et limitent beaucoup la lecture. On peut y lire le nom d'Allah, mais c'est tout ce qu'on a pu m'en lire...
Une inscription dans les ciselures est lisibles : Warmth, soit "chaleur" en anglais. Ce qui jusqu'ici ne m'a pas beaucoup aidé à retrouver l'origine exacte de ce plateau, marocain, indien ou autre.

De l'entretien d'un vieux plateau encrassé

Entièrement recouvert de crasse et de vert-de-gris (des années de Miror mal étalé ayant fait leur travail de sape), il attend maintenant tranquillement chez ses nounous normands que je revienne quelques jours en vacances pour lui redonner une seconde jeunesse. Depuis deux ans, donc, mes soirées normandes riment avec famille et plateau/brosse à dent.

J'ai pu avancer considérablement cette année sur ce travail de longue haleine : l'équipe de L'Atelier du Cuivre de Villedieu-les-Poêles m'a filé un petit coup de pouce : désormais, l'huile de coude sera accompagnée de leur produit magique, le Cuivr'or, mis au point par eux-mêmes, pour eux-mêmes et pour les braves touristes fatigués de frotter leurs cuivres  sans résultat.

En une journée, j'ai pu éliminer plus de cochonneries sur ce plateau qu'en deux mois cumulés (à peu près) de travail acharné. Et ô miracle, la couleur originel du laiton commence à apparaître ! Et ça devient franchement beau à voir...

Promis, juré, craché, je vous fais suivre mes découvertes sur ce plateau et son origine !

vendredi 26 novembre 2010

Du temps où les regrattiers faisaient fortune

Savez-vous ce qu'était un regrattier ?

Je me suis intéressée à ce métier lors d'une très jolie balade sur l'Île Saint-Louis, à Paris. Nous sommes passés rue Le Regrattier quand le vieux dinosaure qui m'accompagnait s'est enflammé et m'a demandé ce que je savais des arlequins.La question n'était qu'un prétexte pour me raconter une histoire :

Regrattier, un commerçant qui profite des restes

Nicolas-Jean-Baptise Raguenet
Le pont Marie et l'île Saint-Louis, 1757
Les regrattiers étaient des marchands peu scrupuleux qui avaient trouvé le job idéal pour faire fortune.

Au Moyen-Âge, comme à la Renaissance, les festins des riches bourgeois et grands seigneurs étaient rarement consommés dans leur intégralité. Les restes étaient récupérés par les regrattiers. Ceux-ci les resservaient sans trier aux plus pauvres contre argent sonnant et trébuchant.

Les regrattiers revendaient ces restes dans des arlequins, cônes de papier roulé, en mélangeant tout, mets sucrés et salés, vieux os et parfois mêmes détritus. De quoi ravir les papilles...

Les regrattiers de sel étaient un peu différents : à une époque où le sel était un bien précieux, imposé au même titre que l'impôt sur le revenu aujourd'hui, les regrattiers de sel, élu par la communauté, le revendaient au détail dans une petite boutique, appelée banc à sel.

La légende de la rue Le Regrattier

D'après mon vieux copain, la rue Le Regrattier, sur l'Île Saint-Louis, est un hommage au fondateur de ce petit coin situé au cœur de Paris.

Un regrattier qui avait fait fortune se pencha sur la question des deux îles  avoisinant celle de la Cité, les îles aux Vaches et Notre-Dame, servant aux paysans pour y mettre leurs bêtes. Il se fit une réflexion qui peut rappeler le promoteur que Jacques Dutronc avait évoqué dans sa chanson Le petit jardin :

"Non, mais franchement, laisser cette terre aux bouseux et autres maraîchers, au prix du mètre carré à Paris aujourd'hui, on croit rêver ! Un bon coup de pelle, quelques mètres cubes de terre, et on en parlera bientôt autrement !"
Et c'est ainsi que le richissime regrattier qui avait fait fortune en revendant des restes combla le petit espace qui séparait les deux îles.

De la légende à la réalité

Plan de Paris par Vassalieu - 1609
Cette histoire n'est pas tout à fait exacte.

Si Le Regrattier est bien l'un des fondateurs de l'île Saint-Louis, il n'avait de regrattier que le patronyme : il fut trésorier de la Garde des Cent-Suisses, au service du roi Louis XIII.

Il rejoignit le riche entrepreneur Christophe Marie et M. Poulletier, commissaire des guerres, dans ce projet un peu dingue qui fera des  deux îles inhabitées (parfois scènes de duels féroces) un quartier chic et résidentiel. L'idée convint au roi Louis XIII et au diocèse : dès 1614 les grands travaux purent commencer.

La particularité de cette urbanisation d'îles vierges est la construction de rues en damier. Ils firent également construire deux ponts en pierre, le pont Marie qui rejoint la rive droite et le pont de la Tournelle, vers le quai du même nom, rive gauche.

Les deux plans ci-joints permettent de se rendre compte de l'évolution du paysage en moins de 50 ans...

La rue Le Regrattier depuis le 17e siècle


Plan de Paris pas Gomboust - 1652
Elle porta différents noms à travers le temps : nommée dès sa création "rue Le Regrattier", elle devint dès 1680 "rue de la femme sans-tête", en hommage à une échoppe qui présentait comme enseigne une femme effectivement sans tête tenant un verre à la main. Les bâtisseurs de l'île n'avaient pas laissé un souvenir impérissable, 50 ans après la fin des grands travaux, pour que que change si vite le nom de cette voie...

C'est en 1870 que la rue reprit son nom actuel. L'enseigne devait être tombée depuis un moment, et ne devait plus avoir assez de sens pour nommer encore ainsi cette artère parisienne...


Sources :
1/  Nomenclature officielle de Paris
2/ Plans anciens de Paris
3/ L'Indépendant du 4e arrondissement de Paris
3/ Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, par Louis Lazare


À savoir : Rue de la femme sans tête est également le nom d'un roman de  Jean-Baptiste Evette, publié chez Gallimard en 2000.

samedi 13 novembre 2010

Le Cabinet de toilette de la Baronne Staffe

Le Cabinet de toilette par la Baronne StaffeVous êtes-vous déjà demandé ce que pourrais donner un mix de la Baronne de Rothschild avec Rika Zaraï ?
C'est en fouinant dans un dépôt-vente que j'ai trouvé la réponse : la très célèbre (fut un temps) Baronne Staffe, auteur de plusieurs guides à succès sur les bonnes manières et l'hygiène féminine.

Les bons conseils de la Baronne

Je ne sais pas si cette dame avait du chien, mais elle a su dicter aux jeunes femmes de la fin du 19e suffisamment de règles en tout genre pour les maintenir dans un corset rigide de bonnes manières et de bon goût. Le sien, en tout cas.

Elle est l'auteur entre autres des Usages du Monde, dont Mme de Rothschild a dû s'inspirer tout comme des milliers de femmes pendant une bonne cinquantaine d'années, et du Cabinet de toilette, déniché cet été dans un rayon de livres anciens.

Ah, les bons conseils de la Baronne Staffe... Pétrie de bonnes intentions et des préjugés de son époque, elle nous explique dans son Cabinet que c'est au Moyen-Âge que la propreté corporelle fut considérée comme une impiété (grave erreur), que le lavage des éponges doit être fait par la maîtresse de maison et non par les domestiques, et que pour garder le teint rose et frais en vieillissant, si des mondanités nous empêchent de nous coucher avec les poules il est conseillé de boire un bouillon et un verre de malaga en se couchant.

Si ma mère m'avait enseigné ça un jour, je crois que je l'aurais regardée avec de grands yeux ronds...

Femme à sa toilette par Caillebotte, 1973Mis à part ces détails, un grand nombre de recettes de lotions, crèmes et potions naturelles émaillent les pages de ce guide plutôt bien écrit. La Baronne critique vertement les produits cosmétiques industriels, responsables de tous les maux (une visionnaire, la Staffe ? où simplement une personne d'une grande lucidité ?), et invite de toutes ses forces au naturel.

En feuilletant ce guide, j'ai souvent eu envie de rire (je ne me suis pas beaucoup retenue), et parfois de noter ses conseils. En bref j'ai eu l'impression de lire l'une de ces revues féminines bourrées de conseils de beauté qui suivrait la mode du retour au naturel, blindées de photos retouchées de filles squelettiques  dont le naturel consiste en un maquillage épais mais dans des tons discrets.

La Baronne, sa vie, son œuvre

Retour maintenant aux origines de cette fameuse Baronne Staffe. Je n'ai pas pu m'empêcher de fouiller un peu sur le Web, pour y découvrir qu'elle n'est pas plus Baronne que moi, mais plutôt une modeste bourgeoise, née en 1843 sous le nom de Blanche Soyer et élevée par ses deux tantes à Savigny-sur-Orge. Celle qui publia Mes secrets pour plaire et être aimée finit vieille fille, sans contact particulier avec l'aristocratie française, mais eu un tel succès avec ses ouvrages qu'elle fut capable de s'offrir un pavillon à Savigny, la Villa Aimée, devenu paraît-il le commissariat de police de la ville (!). Elle travailla pour différents journaux de l'époque (dont le Figaro) sa plume n'étant pas dénuée d'intérêt.

Victor Havard, éditeur de la Baronne

On en arrive maintenant au professionnel du livre, et à ce qu'il fut à l'époque de notre spécialiste des bonnes manières : Victor Havard, qui publia l'exemplaire du Cabinet que j'ai entre les mains, avait repris la suite de son père, Gustave.

Je n'ai pas trouvé beaucoup d'informations à son sujet, à part qu'il fut l'éditeur de Maupassant et que sa maison d'édition lui causa certainement plus d'une crise de foie :

La fin du 19e fut une période vraiment très dure pour les éditeurs-libraires, qui fut fatale à notre Victor. Jugez plutôt : son père résista à deux faillites en obtenant des concordats, sorte de redressement judiciaire, en 1846 et 1861.

Le fils eu moins de chance : un premier concordat accordé en 1896 (année de l'édition de mon Cabinet, vous l'aurez relevé sur la couverture du livre) l'avait sauvé, une deuxième faillite en 1906 lui fut fatale.

La faute à qui ? Certainement à une sorte de capitalisation renforcée du monde de l'édition, où les gros créèrent des sortes de grossistes du livre, ou fusionnèrent les uns entre les autres (comme Le Moniteur et Dalloz à cette même période). Et où un maximum de petits éditeurs indépendants disparurent définitivement*.

*Source : Histoire de la Librairie française, éditions du Cercle de la Librairie 2008

mercredi 3 novembre 2010

Salon International du Patrimoine culturel : du 4 au 7 novembre 2010

Salon International du Patrimoine Culturel 2010 - Carrousel du Louvre, ParisVite, une info de dernière minute !
Du 4 (soit demain) au 7 novembre 2010 aura lieu le Salon International du Patrimoine Culturel au Carrousel de Louvre, à Paris.
Ce sera l'occasion de rencontrer les spécialistes des métiers d'art, de se pencher sur les particularités du patrimoine méditerranéen et de passer un bon moment entouré de belles choses...
Aurais-je le temps d'y faire un tour ? Hmmm... je l'espère !
Plus de renseignements sur le site du Salon : www.patrimoineculturel.com

dimanche 31 octobre 2010

Artisanat du livre : création d’un livre d’art au tirage limité

Ce diaporama de photos prises sur toute la durée de la création de ce livre a été trouvée sur le Blog du Bibliofil :



Ça donne le vertige, non ? J'aimerais parfois pouvoir ralentir le débit de cette avalanche de photos (plus de 3000 clichés pris en deux mois !), pouvoir observer en détail la réalisation de ce livre d'art. Bon, en fait, ça me donne tout bêtement envie d'aider cette femme, de discuter avec elle, d'apprendre son art et de passer du temps dans son atelier...
En tout cas, j'applaudis à deux mains le photographe et l'artiste relieuse, l'idée est excellente et passionnante !
The Complex Of All Of These a été publié en 35 exemplaires, numérotés et signés par son auteur-façonneur, Abigail Wendler Uhteg.
PS : Après avoir fait une petite recherche rapide sur la toile, j'ai trouvé une fiche de ce livre en vente dans une association américaine, Women's Studio Workshop.

lundi 25 octobre 2010

Drouot le temps d’un week-end

Les 20 et 21 novembre prochain, le très célèbre Hôtel Drouot à Paris ouvre ses portes aux visiteurs et leur permettra de poser toutes les questions qui les tarabustent à ses commissaires-priseurs...
À vos agendas !

vendredi 22 octobre 2010

Mobilier : reconnaître les styles... en quelques livres

livres en bibliothèque Le mobilier, moi, j'adore ça. Je ne suis pas une spécialiste, loin s'en faut, mais quand je regarde un meuble j'apprécie toujours le travail de l'ébéniste qui l'a fabriqué, du designer qui l'a conçu (si ce n'est pas la même personne), et je cherche toujours à découvrir des détails aussi méconnus mais à mon sens importants que le nom du type pas bête qui a inventé les tiroirs.
Je n'y connais pas grand-chose, pour le moment, mais en me penchant sérieusement au-dessus du rayon "Mobilier" de la librairie où je travaille, je me suis rendue compte qu'un certain nombre de livres ont été publiés pour les amateurs comme moi ou les pros qui peuvent avoir besoin d'un pense-bête.
Et ces livres-là sont une véritable source de plaisir pour qui aime l'Histoire, l'art, et l'Histoire de l'art...
Du coup, ni une, ni deux, je vous propose ma sélection "coup de cœur de la libraire" :
Reconnaître les meubles de style
- Reconnaître les meubles de styles, de Pierre-Marie Favelac, éditions Massin 1981 (9782707200600)
Sur papier glacé, celui-ci propose un panorama du mobilier de style de la Renaissance à 1925. On peut se demander ce que pense l'auteur du mobilier contemporain, pour avoir squeezer un pan non-négligeable de l'art du 20e siècle, mais pourquoi pas...
Richement illustré de photos en couleurs, il est succinct mais déjà intéressant.
Son point fort ? En fin de chapitres un récapitulatif des particularités de chaque type de meuble classé par époque  et des encadrés vite repérables concernant les créateurs à connaître pour chaque style.
Bon à savoir : les éditions Massin, spécialisées dans l'architecture, la déco et l'artisanat, publient une série d'ouvrages sur le mobilier région par région ou époque par époque, plus complets que ce guide général.

Reconnaître et choisir ses meubles - Éditions Hachette Pratique - Olivier Collin du Bocage
- Reconnaître et choisir ses meubles, de Olivier Collin du Bocage, éditions Hachette Pratique 2005  (9782012369481)
Celui-là est clairement positionné sur l'aide à l'achat de mobilier : écrit par un commissaire-priseur de Drouot, il est truffé de conseils sur les points à ne pas négliger au moment de l'acquisition d'un meuble. Détails qui seront  gages de sa qualité... Il présente la valeur des différents types de meubles sur le marché.
Ce dernier point est une estimation faite sur des meubles bien précis qui permet juste de se faire une idée des prix. Ce n'est pas un argus, d'autant que cette édition date (déjà) de 2005.
Certains détails des meubles mis en exergue et agrandis pour illustrer le texte et quelques pages plus techniques (sans excès), sont les compléments presque obligatoires à ces cotes. Par exemple, les différents types d'assemblages vous seront présentés sous forme de schémas, et permettront de mieux fixer un lexique parfois difficile à saisir pour qui ne s'y connaît pas.
Moins joli et encyclopédique que les trois autres titres de cette sélection, aux illustrations moins belles, il est résolument pratique : il pourra vous accompagner en salle de vente ou dans des dépôts-vente bien achalandés et vous évitera à l'achat quelques erreurs de débutants.

Étude des styles de mobilier - Éditions Dunod- Étude des styles de mobilier - 2nde édition, de André Aussel et Charles Barjonet,  éditions Dunod 2009 (9782100522231).
Plus technique que les deux premiers, c'est une édition connue depuis très longtemps et souvent achetée par des étudiants en ébénisterie qui ont besoin d'un ouvrage synthétique et bien pensé.
La grande nouveauté de sa seconde édition (avril 2009), est l'apport de la couleur : rien de tel pour mieux observer en détails les exemples proposés ! Les schémas plus techniques et les meubles dessinés (à la main ?) sont toujours en noir et blanc, mais cette évolution entre les deux éditions reste non négligeable.
Ce guide classé par époque couvre les périodes allant de l'antiquité (Égypte etc.) à l'époque contemporaine (environ 2003).
Son plus ? Un tableau synoptique très pratique qui présente l'évolution de l'architecture, des coffres , des  tables, des siège et des lits  sur une double page pour chacun d'entre eux.


- Guide des meubles et des styles, Françoise Deflassieux, éditions Solar 2005 (9782263034954)
Celui-ci, c'est mon chouchou, le plus complet et le plus agréable à feuilleter :
Lecture plaisir, il couvre toutes les périodes depuis le 14e siècle (soit le gothique flamboyant) jusqu'après 1925.
Très bien illustré, en couleur, il retrace aussi bien l'histoire du mobilier que celle de ses artisans (ébénistes, tapissiers, designers...). Il met en perspective l'Histoire de chaque période et l'évolution des styles, de façon beaucoup plus précise que dans les autres ouvrages que j'ai pu consulter. On se rend alors vraiment compte du lien entre la vie quotidienne, les goûts de chaque époque et la recherche du mieux et du beau des artisans.
Un récapitulatif par type de meuble, qui concerne environ 1/3 de son contenu, le recentre sur son thème principal. Accompagné d'un lexique bienvenu, il peut aussi bien plaire à un néophyte qu'à un professionnel.
En espérant que ces quelques lignes vous donnent envie de creuser le sujet !

lundi 18 octobre 2010

Claude Le Petit, poète underground du 17e siècle

Poème de la rue de Nevers de Claude Le Petit sur le Pont Neuf, écrit en1668Une promenade est très souvent l'occasion de découvrir quelque chose : une trace du passé, l'occasion d'une rencontre, un paysage intéressant...
Pour cela, rien de plus simple : marcher tranquillement, lever le nez, poser les questions qui nous viennent à l'esprit ou noter ce que l'on voit pour rechercher à notre retour les origines des particularités rencontrées.
C'est ainsi que vous pouvez tomber sur le poème de Claude Le Petit, poète "underground" du 17e siècle, brûlé sur la Place de Grèves à Paris pour avoir écrit un texte blasphématoire envers la Vierge...
Le poème inscrit au plafond de ce porche, à l'entrée de la petite rue de Nevers, dans le 6e arrondissement de Paris, retrace l'origine et l'état du pont Neuf, que l'on peut admirer depuis cet endroit, à l'époque de sa construction sous le "bon roi" Henri IV.
En voici la teneur :
Toi qui vas les guetres trainant
Au long des quais de la rivière
Lis ces vieux vers écrits au temps
Ou ce beau coin de ton Paris
N'était plus qu'une fondrière
Indigne du bon roi Henry
Faisons icy renfort de pointes
Ce chemin nous mène au Pont-Neuf
D'un bon régal de nerf de boeuf
Saluons ces poutres mal jointes
Vrayment Pont-Neuf il fait beau voir
Que vous ne vous daygniez mouvoir
Quand les estrangers vous font feste
Savez-vous bien nid de filous
Qu'il passe de plus grosses bestes
Par dessus vous que par dessous.
Pourquoy nous faites vous la morgue
Avecques vostre nouveauté
Pont en cent endroits rajusté
Tout ainsi qu'un vieux soufflet d'orgues
Vous qui faites compassion
À la moindre inondation
D'où vous vient cette humeur altière
Est à cause que vous avez
Cent égouts dans votre rivière
Et plus d'estrons que de pavez
Claude Le Petit  1668

Un poète pas franchement dans les clous

Claude Le Petit - Sonnets luxurieux - Editions Urdla
L'histoire de ce poète est digne d'un roman de Jean Teulé : plusieurs légendes courent sur la manière utilisée par ses détracteurs pour le faire enfermer et condamner, mais une chose est sûre : il a fini étranglé puis brûlé sur la Place de Grève en 1662 à l'âge de 23 ans, après un procès vite mené, interrompant ainsi un œuvre déjà impressionnant.
(Un détail me saute aux yeux : pourquoi ce poème sur ce plafond est daté de 1668 alors que son auteur est décédé six ans auparavant ? )
Auteur de plusieurs textes très connus à l'époque, diffusés par le bouche à oreille et sous le manteau (meilleur moyen à l'époque de contourner la censure), le poète libre et libertin a publié un grand nombre de poèmes stigmatisant les événements de cette époque ou dévoilant un Paris fait de soyeux cotillons et de positions inaptes au calme des sens, dont entre autre le Bordel des Muses.

Quand le présent répond au passé : Censure, quand tu nous tiens !

Bordel des Muses - Gravidir Smudja - Editions DelcourtUne histoire amusante (voire inquiétante) à ce propos : il y a quelques années, une magnifique bande dessinée réalisée par Gradimir Smudja sur la vie de Toulouse-Lautrec reprenait ce titre. Par demande express du Moulin Rouge, qui ne souhaitait pas qu'un rapprochement soit fait entre son institution et un lupanar, l'éditeur a décidé de faire changer le titre de la série à l'occasion de la parution du troisième tome. Les prochaines éditions ainsi que la suite de cette série s'intituleront désormais Le cabaret des Muses. En deux temps trois mouvements, on modifie un titre sans se préoccuper de son sens, pour (à mon avis) une mauvaise raison : le Moulin Rouge est situé en plein quartier de Pigalle, son histoire y est très étroitement liée. C'est un peu triste, et même si Smudja ne risque plus le bûcher pour avoir écrit une histoire sulfureuse, on ne peut que s'inquiéter de cette censure.

Quelques liens intéressants sur le sujet :

Je vous conseille vivement de faire un tour sur le site de Biographie.net, où l'histoire de Claude Le Petit est décrite en détail. Ce site est une mine d'informations passionnantes sur les grands personnages de l'Histoire.
Pour les amateurs de BD, c'est le site de la Bédéthèque qui m'a apporté les réponses à mes questions quand je suis tombée sur le tome 3 de la série du Bordel des Muses de Smudja. Portail de critiques de lecteurs sur la bande dessinée, c'est une base de données très riche qui parle aussi bien des auteurs et illustrateurs de bandes dessinées que des éditeurs et des libraires spécialisés. Elle a la particularité d'être enrichie par les utilisateurs de son logiciel de gestion de base de données , BD'Gest.
Et c'est ainsi qu'on passe d'un poète du 17e siècle à un logiciel de base données de livres : quand on vous dit que lever le nez peut instruire...

mardi 21 septembre 2010

Les dinandiers, façonniers du cuivre

Casserole a l'étamage, couverte de blanc d'EspagneLes derniers ateliers de dinanderie d'Europe se trouvent dans une petite ville de Normandie : Villedieu-les-Poêles.
Je vous invite à faire un tour dans cette ville typique du Centre-Manche. Les petites cours, autrefois habitées par les artisans du cuivre, de l'étain ou de la dentelle, peuvent faire l'objet d'une belle promenade. Les nombreux magasins d'artisans, les ateliers-musées et le musée du meuble normand remplissent les yeux de beaux objets du quotidien, anciens ou curieux.
Ce n'est pas un hasard si les habitants de Villedieu sont appelés les Sourdins : fondeurs de cloches ou artisans du cuivre sont ici dans leur capitale, et depuis le 17e siècle, les coups de marteaux résonnent joliment aux oreilles des ouvriers...
Entrée de l'Atelier du Cuivre de Villedieu les poêlesL'Atelier du cuivre, composé aujourd'hui d'une dizaine d'employés, propose aux amateurs des visites guidées dans son atelier. Ici, repousseurs, étameurs et ciseleur donnent toute sa noblesse au cuivre et à ses multiples utilisations.
Rétameur sur vase HarvardÀ l'Atelier, 75% du chiffre d'affairs provient des commandes de deux designers célèbres : Philippe Hiquily et Philippe Stark. Ces deux-là font réaliser des oeuvres destinées à des lieux aussi luxueux que l'Hôtel Meurisse à Paris, ou encore les palaces nouvellement sortis de terre (ou de mer d'ailleurs) à Dubaï. Souhaitons à ces messieurs d'avoir encore longtemps l'inspiration devant ce minerai rouge...

Atelier d'étamageNe nous voilons pas la face : le cuivre n'est pas à la mode et les gisements de ce métal se font de plus en plus rare (en France, les derniers se sont éteints en 1781) : ce n'est pas sans raison que Villedieu est devenu le refuge des derniers ateliers de dinanderie...
Un endroit idéal pour qui aime chiner, découvrir et discuter avec les artisans de leurs métiers.

dimanche 15 août 2010

Bouvet et peson : premières découvertes de l’été au dépôt-vente

Peson ancien balance crochetPremière visite de l'été au dépôt-vente, et déjà deux découvertes : une petite plaque en laiton soutenant un crochet, d'une dizaine de centimètres de long sur deux de larges : c'est une balance, autrement appelé un peson.
Peson : crochet et ressortJe n'en avais encore jamais vu, et ai appris qu'un exemplaire se trouve dans un atelier de la famille. Celui-ci présente d'emblée un poids de 500g, à vide (il peut aller jusqu'à 15 kg). Les pesons étaient des objets usuels il y a encore une cinquantaine d'années, et servaient par exemple à peser les pommes de terre, chez le primeur. On peut imaginer les abus que ces balances ont pu permettre, car même si l'écart de celui-ci peut s'expliquer par son grand âge et la rouille de son ressort, les trébuchets trafiqués étaient monnaie courante...
Bouvet ou rabot à moulureCe rabot, c'est un bouvet, ou rabot à feuillure : il sert à réaliser des rainures, qui permettent de fabriquer le système d'encoche des parquets.
D'après la taille de la lame (environ 1 cm), il semblerait que celui-ci ai servi à réaliser des feuillures d'une taille respectable. D'autres lames pouvait être fixées dessus, jusqu'à ne faire que la largeur de la petite lamelle de fer centrale. Il est réglable, on peut abaisser ou rentrer la lame comme on le désire.
Bouvet : signé J. TapinOn peut lire sur le côté de ce bouvet la signature (vraisemblablement) de son propriétaire et peut-être aussi de son fabricant : J.Tapin.
Une question reste en suspens : est-il de type mâle ou  femelle ? Je n'arrive pas à trouver la réponse, beaucoup de personnes se contredisent... N'hésitez pas à me laisser un commentaire si vous avez la réponse !

vendredi 13 août 2010

Pour commencer

Lettrine dessinée par Claude Lebreton pour le livre de Maurice Genevoix, Les Mains vides.uand on rédige un CV, on stipule souvent dans les centres d'intérêt des loisirs aussi anodins que la lecture, la musique etc.
Mais quand il s'agit véritablement de passion, alors tout est différent. Le petit truc en plus qui vous anime dès que vous touchez à ce qui vous plaît, dès qu'une activité vous enrichie et vous motive n'a pas de prix, et ne peut se résumer à un loisir de bas de page.
Je suis libraire depuis bientôt 13 ans. Les livres, je commence à voir à quoi ça peut ressembler, et les gens qui les diffusent font partie de mon paysage.
Au fil des ans, les rencontres m'ont un peu décillée : non, il n'y a pas que les livres dans la vie, non, la lecture n'est pas la seule activité passionnante des quelques moments de liberté durement gagnés !
Lors d'une journée Portes ouvertes chez l'horticulteur de mon cœur (mon père), un potier est venu présenter ses créations, et a proposé aux visiteurs de faire un petit tour sur son tour.
Révélation : les mains dans la terre, je connaissais. Les mains dans l'argile et la barbotine, pas du tout. Sentir ce morceau de terre humide et chaud à la fois tourner, se lever, se blottir contre mes mains, obéir au moindre mouvement de mes doigts et... s'écrouler sous la pression m'a fait comprendre que plus jamais je n'oublierai la sensualité de la terre.
Quelques années plus tard, l'une de mes belle-sœurs m'a refilé un curieux virus : celui de l'Appel du dépôt-vente. Chaque visite chez elle veut dire une visite pour notre plus grand plaisir à toutes les deux au dépôt-vente de Coutances, La clé des temps, et chaque visite veut dire au moins une découverte (achetée ou pas...), un besoin de rechercher des informations sur un objet curieux, une signature inconnue, un style à découvrir.
J'aime lire. J'adore lire. Je ne peux pas le détailler au bas d'un CV mais la lecture me transporte ailleurs ou m'ouvre les yeux sur ce qui m'entoure, et j'adore ça. Alors ce blog fera également la part belle aux livres lus (ou pas), à l'artisanat et ses acteurs. Pour moi, pour mon plaisir, et j'espère aussi un peu pour le vôtre.
Bonne lecture !